Un oiseau a perdu son espace
Casser le rituel, sortir de l’ornière, récupérer ce cerveau qui n’obéit plus, cet organe qui ne fait plus partie du corps, un oiseau a perdu son espace, un aimant l’attirant inexorablement au même lieu à la même heure, là où il ne veut pas aller, là où il ne doit pas aller, pourtant un semblant de raison, les feux rouges, les alarmes s’emballent à réveiller les morts, et la croix dans toute sa puissance fière de sa force rigole de la soumission de l’humain. Un chien a mangé un oiseau, une image d’aujourd’hui, les ailes se sont immobilisées.
Fuir la mort trop présente, un au revoir trop pressé, ne pas laisser transparaître le poids de la douleur, vous dont l’absence se renforce, des fleurs rapidement arrosées, des larmes effacées, quelques mots noués murmurés en ce lieu de repos, confidences à la mort, un appel au secours la croix à la main, et un déchirement, l’autre, ma déraison, peut-on obliger à aimer, rapidement un mouvement de la main, les yeux ailleurs, ravaler sa propre honte, des ailes coupées, un oiseau à terre. Adieux bâclés, se cacher et laisser couler, couler les bras en croix, attendre la raison s’infiltrer dans une tête vide. Tout va tellement mieux quand on se fout de tout. Refuser le moindre frémissement s’enfermer dans une carapace celle de la solitude, devenir un chien sans collier, sans caresse, surtout sans caresse, ne pas perpétuer un chemin de croix, il n’y a pas d’issue, aucune échappatoire.
Une valise à faire, une valise en partance, casser le rituel, une valise en détresse poursuit sa course sur un tapis roulant, personne n’en veut, elle put la misère, à qui appartient ce bagage, tout bagage non accompagné sera détruit immédiatement, l’on fuit la pauvre valise abandonnée, et reste un oiseau en perdition dans l’attente de la dernière seconde. Une main sur l’épaule, ce bagage est-il à vous ? La détresse de cette valise vous appartient, elle vous ressemble. Est-ce la main du diable qui tend le poids des douleurs, états d’âmes, échecs incrustés au fond de ce bagage tellement lourd qu’il est prêt à accompagner le cœur blessé, et la croix dans toute sa puissance fière de sa force rigole.
Casser le rituel, sortir de l’ornière, réapprendre à voler, à écouter cette vague sans écho, juste une mousse blanche, les relents échoués d’un trop plein, protéger les yeux, de quoi d’ailleurs, de l’éblouissement, chimère, ils ne voient plus en trois dimensions, ont perdu le relief de la vie, une vie à plat, un oiseau sans ciel. Des mots entendus et maintenant compris, au fond d’un trou il n’y a rien à voir. Mettre les lunettes de soleil dans sa poche, avancer droit devant, les yeux baissés. Circulez il n’y a rien à voir, un oiseau gît sur la plage, un chien joueur lui a coupé les ailes, ce n’est pas sa faute, l’oiseau à trop jouer s’est brûlé tout seul.
Lutin – 02/09/2005