Poésie de l'espace
Je suis venue prendre un café tôt ce matin
j’ai traversé la grille
les jambes croisées, à ciel ouvert au milieu du silence
je griffonne sur la table les parfums autour de la tasse
ils sont beaux nos amis les oiseaux alors que personne ne m’embrasse
je les vois s'aimer à coups d’ailes, à coups de becs
dans leur danse sensuelle je respire leur langage
le bruit du silence qui s’éveille
alors que nous nous taisons toujours
Personne ne m’embrasse et mes lèvres se tendent
j’embrasse le vent
j’embrasse la pluie qui ne tombe pas
le sol asséché
les odeurs au fond de ma poitrine
la main qui ne se pose pas
la montée de la lumière
Je suis venue voir le jour qui commence
J’embrasse le paysage
la feuille blanche sur le marbre encore froid
le gravier sous mes pieds
le champagne que nous n’avons pas bu
le café que je porte à ma bouche
les gâteaux que nous n’avons pas mangés
et l’arôme que je porte à mes lèvres
rempli de présence
Les cuisses douloureuses
nues sur une chaise de fer d'heures entières
les bras attachés à mon torse
j’enlace les lettres que j’écris
ma poésie de l'espace
sur des pages volantes je les retiens
Regarde-moi penchée sur la table
un mouchoir à la main, je crains le vent
je crains le sable et les reflets
seule la pluie assèche mes yeux
non je ne pleure pas, je suis sensible
aux variations des couleurs et des mouvements
Regarde j’ai découvert le sens de la prière
le rêve solitaire
j’ai caressé un chat de gouttière
j’ai aimé son regard levé vers moi
ses yeux rien que pour moi
au-dessus glisse l’envie de la mer
l'envie du voyage
lutin - 26-05-2011
Child
La roche est friable
et la mer de sel s'évapora
fille de l'air elle quitta la terre
propriétaire de l'espace
Epouse du soleil
le cadenas clos
elle danse le dimanche
loin du puits creusé
entre cercueil et montagne
au domaine des morts
Pose tes mains sur la pierre
encore chaude l'eau reviendra
mouiller tes mouchoirs
lutine - 25-05-2011
Claquement d'aile
Comment dormir ?
je veux jouer à colin maillard
tissu de soie contre les reins
Quand la vie s'efface
dans le dos il n'y a rien
que des paroles inutiles
et les orages ouvrent la terre
Sous le bandeau
courent l'arbre et son ombre
petites bêtes accrochées à l'écorce
je suis le tronc
sans pardon
l'empreinte et le souvenir
dans le nœud du bois
on y compte les âges
le désert qui emplit la nuit
Les oiseaux ne chantent pas
témoins du soleil
il faut attendre le premier cri
de nos âmes insipides
lorsque je suis assise
il arrive juste avant le premier claquement d'aile
lutine - 24-05-2011
Un jeu de rimes (sur une peinture d'Aglaé)
Théodule - une peinture d'Aglaé
Les yeux ailleurs
loin à l'intérieur
ils n'ont pas peur
plein d'un meilleur
Les cheveux trop blancs
le teint de même couleur
l'éteint livre ses pans
serait-ce la douleur ?
Contre l'arbre me voici cloué
est-ce la raison ?
je me croyais doué
blotti près de la moisson
C'est le temps du poison
devrais-je me laver les mains ?
quand circule un frisson
attendrais-je demain ?
Trop de hâte n'est pas bon
je caresse la soie
m'envoûte plus que de raison
comme un arrêt de moi
J'ai traversé l'approche
surmonté les ravins
serais-je roche ?
ou battement de la main ?
lutine - 22-05-2011
Dessine-moi et peins-moi
Dans la fenêtre ouverte
J’attends la pluie, le bruit sourd
contre les carreaux j’attends ses larmes
l'arme contre la peau
le long des murs chauds de la journée
je l’attends, je la supplie
Le tonnerre gronde dans ma tête
dans l’air que nous respirons
déjà la terre est sombre
enfouie dans nos visages
petites bêtes suspendues
elle avance dans la lumière
Je la laisse venir
ça claque
regarde l'eau comme elle file
je devine son manège, sa douceur maligne
j’attends sa lame
traînant les orages
Dans la fenêtre ouverte le vent s'est arrêté
elle marche dans le paysage
quand ton corps s’en va perdu
proche de l'évanouissement
Dans la fenêtre ouverte se cognent les avions perdus
et les bateaux échoués
les combats lourds de pluie
étrange lumière, l'eau immobile
Les nuits dangereuses égrainent la fin du jour
contre la vitre l’insomnie de l’oiseau
prie dans la main, libre
libre de ne plus vivre
libre d'être
La terre est sombre
le ciel au crépuscule
lutin 20-05-2011
Matin
Secouer les draps
les rêves et les larmes
alors que le soleil poursuit son destin
sentir l’air qu’on ne voit pas
la fièvre tombe fenêtres ouvertes
Plume échappée d’un lit défait je te regarde choir
rejoindre la rosée qui habille le printemps
Les seins écrasés au bord du balcon
yeux mi-clos protégés d'un nouveau jour
se pencher vers le bas et regarder
la chute de la nuit
les corps en suspension
lentement se défaire des odeurs
Les heures d'insomnie se balancent
dans un faisceau de lumière
sur le ventre doucement se posent
cheveux défaits
peau usée
la mort se nettoie
et on ne peut la toucher
C’est ainsi que les oiseaux trouvent matière à leurs nids
Lumière d’or venue du ciel
le monde est à deux pas
le fleuve submerge le lit
invisible mer devenue silence
.
lutin - 21-04-2011
L'atelier de lutin
C'est ici que cela se passera http://billieart.canalblog.com/
ce lien est déposé à gauche
Les secrets de lutin doivent rester l'écriture.
(J'ai perdu quelques messages en transportant mes pots de peinture mais ils sont dans mon coeur)
Calcul mental
Quel est le moyen pour s’en sortir, il y a deux manières de dégager une forme par soustraction et par addition, je n’aime pas les mathématiques. Comment retrancher ce qui ne va pas dans la tête. Je suis architecte et j’échafaude dans l’espace les volumes, du vide je fais un plein de ce matériau impalpable rendant possible tous les modelages, les constructions.
Quelques instants s’écoulent dans le silence puis reviennent résonner contre la fenêtre, derrière la porte, les signes des opérations. Tu as respiré dix fois dans la minute écoulée il y a quelques jours, il y a deux jours et quelques heures. Je ne divise plus en heures, en minutes et en secondes. Je sais qu’il reste des tours à l’envers à défalquer aux années empilées. Au vingtième tour et quelques mètres où en serais-je du temps passé. Le temps que je calcule les heures tournent, les minutes chronométrées s’emballent et la mer monte alors que le soleil plonge dans l’eau.
Le sablier entre les doigts écartés je compte la poussière, les graviers et la peau arrachée. J’additionne les vagues toutes les cinq secondes, la distance parcourue, les bulles d’air éclatées au sol, les intervalles entre flux et reflux longs et plats comme un électro épuisé.
La mer fait la plage et le vent la défait.
Le bracelet-montre étanche maintient l’os du poignet, je peux te dire que 36 minutes se sont écoulées de l’absence à la présence, l’absence est la soustraction, le signe de croix l’addition, la main si présente au croisement du signe. S’accroupir c’est se soustraire, de quoi, du regard, où est-ce la déconstruction. D’un geste rapide et habile, elle enlève le compte-tours du bras, arrache le cathéter, retire la seringue, il n’y a plus de temps derrière la porte, dans le couloir. Combien de souffles du rez de chaussée à l’étage, le tensiomètre sur la table est mort, plus de séquences dans les yeux esquintés, le regard s’égare.
Elle fait la moyenne des plus et des moins, à l’oblique regarde l’appareil photos des sourires volés. La vingtième image est un homme sur son vélo griffant le sol à coups de freins, traversant l’air à coups de jambes. Il est vingt heures et les roues s’allongent, le métal devient immense équipé d’un corps de géant. Là ce n’est pas du calcul mental c’est la déformation alors que treize signes se confondent dans l’eau.
A quelle température avons-nous fusionné, je crois qu’il faisait 20° sur la pelouse haute de quatre centimètres à trois mètres de l'eau profonde de 1,50 m, le soleil à la vertical, il était midi et quelques secondes, nous étions cinq à compter nos prouesses, trois corps se sont soustraits, cinq moins trois égal 2, quatre jambes côte à côte, deux paires de mains.
Elle replie le paréo où se décomposent les doigts, l'encre d'un livre à 200 pages écrit à quatre mains, le remet à sa place, dans l’angle de la chambre. Elle vérifie le thermomètre, 33° le corps dans le vide, peut-être plus si elle s’étale par terre la fièvre au ventre.
Elle recule d’un pas à la recherche de l’ombre, la lumière avance de deux pas, elle retire le drap, continue sa marche arrière de quelques mètres et centimètres jusqu’à la pelouse rase près de l'arbre à angle droit. Inlassablement les rayons du soleil la couvrent, deviennent diamètre et cercle qui l’enferme.
39° la peau s’enflamme, deux comprimés pour la tête, pour le sang qui pulse, encore deux comprimés, quatre pastilles sous la langue d’un même médicament, elle regarde lentement autour d’elle. A 180° c’est une tête qui dévisse, c’est une soustraction du corps, c’est revenir à la case départ :
Je n’aime pas les mathématiques, comment retrancher ce qui ne vas pas dans la tête.
Comment soustraire le mystère des sources cachées
l'intimité de la rivière
et les paysages retrouvés.
lutine