Putain, merde, fait chier, tu vas les cracher ces mots, tu vas cracher ta haine, le don carnivore de toi dans le plexus à fond perdu, tu es au centre, autour et nulle part, tu es un courant d’air, le sifflement sous la porte, l’air compressé dans la fermeture de la fenêtre, tu es la douleur, le citron pressé, la pulpe aplatie, la peau écrasée de ce qui n’existe plus, le gramme sous le quintal, la pièce de 5 centimes coiffée sous le billet, l’apnée face à l’oxygène, le tableau brûlé sous le musée, le bâtiment explosé sous le volcan, la lave refroidie éclaboussant la mer, la vague sous le galet, l’arc de l’arbalète, la flèche tendue dans l’élastique cherchant la cible.
Tu es si faible contre le fort, le pied bloqué dans le contrefort, la pierre précieuse dans le coffre, le coffre entouré de vigiles, petit pion de carton pâte sur l’échiquier d'acier. Tu es si faible face aux cris, le muscle léger face au néant rempli de force, le sirocco dans l’espace monstrueux, les poumons asséchés, la chaleur sous la peau. Tu es femme à plat ventre face à la tempête attendant la fin, les bras cerclant ton visage.
Je suis petite, le monde est grand, Putain, je vais grandir, pouvoir vieillir tranquille sans la peur de la ride, du cheveu blanc, du poil au cul se démarquant de ses confrères. Putain j’ai mérité cela. Je suis le point final et non la virgule qui effleure comme le vent pousse le cheveu. Maintenant il n’y a plus de poing d’interrogation, ni de poing de suspension, c’est le poing final, c’est le trou. J’ai peur de ce silence qui tisse l’épaisseur. J'ai peur de la couleur "mort dorée" de cette demi-mort, du tic tac inutile de l’écran géant écartant les bras, resserrant l’étreinte à l’étranglement, j’écoute le silence.
Il pleut des hordes d’humains bouches bâillonnées dans un silence de mort, la corde au cou entre deux avions, ça vous prend à la gorge et vous laisse muet. C’est trop injuste l’injustice tuant la mémoire, l’oreiller jeté au sol, putain, jeté au sol comme l’outil inutile, l’allumette entre les mains. Je peux peindre mais sans toi, je peux dormir mais sans toi, je peux vomir mais sans toi dans un avion entre lit et plafond à l’intérieur de moi.
Je serai l’algue rampant sur les planches, la plante féroce qui se relèvera, le cactus sans épine, debout, face au public. Je serai le sang devenu blanc comme l’oiseau sans teint tué d’un jet de pierre par l’enfant innocent, innocent, innocent….la main sans la main.
Il faisait beau avant l’holocauste, je suis sortie de ta peau par les pores de ma peau à trop suer entre mots et gestes à genoux, d'un nombril éclaté.
J’ai un nouveau livre plein de pages, je les tourne chaque soir, elles sont blanches, je les lis longtemps jusqu’à m’endormir épuisée des mots blancs coulissant à l’étranglement. Je rêve de ces mots blancs en faisant des images.
lutin - 15-10-2008