Le pire et le meilleur
Le pire et le meilleur
Un ventre c’est rien du tout on rentre on sort dit-elle, je reste suspendue, elle est dans un train, elle me dit je coupe il y a de la racaille. Il est 21 heures. Je l’imagine cette bande, celle que l’on écrit dans les journaux. Remontent les faits divers du matin rapidement parcourus comme on feuillette une bande dessinée le croissant à la main. Je suis un cerveau secoué d’angoisse relatant ce qu’il ne croyait pas avoir mémorisé, l’horreur de l’humain quand sa bande l’accompagne. Je suis cette jeune femme bloquée sur son siège se récitant les mêmes faits, je suis la souffrance, je deviens elle. Unies, elle dans son train, moi près du téléphone, nous sommes en communion. Jamais nous n’avons entendu nos cœurs battre au même tempo, une cadence qui s’accélère au rythme des secondes. Le même geste, chacune la main sur un numéro d’urgence pour calmer la rougeur de l’attente, la blancheur de la peur.
Un ventre c’est rien du tout on rentre on sort dit-elle, j’invente les séquelles, elle est dans un train, je voudrais être là, vivre le moment, prendre sa place, mon ventre contre le sien. A la fenêtre je regarde le ciel, je prie la lune, éclaire le wagon je t’en prie, donne ta lumière, évite les horreurs, le ciseau qui déchire les entrailles.
Je ne veux pas être lune
elle est le témoin de nos errances
Si j'étais lune j'aimerais avoir des yeux
fermer les paupières quand le monde brûle
d'un clin d’œil regarder l'amour quand il passe
Notre lune est un phare sur la vie
elle ne s'éteint jamais
elle voit tout
le pire et le meilleur
Un ventre c’est tout, il lui appartient, c’est le mien devenu sien. Sa chair est la mienne devenue sienne. Un ventre, peau de velours, on y rentre avec douceur, une main sur la joue glissant le long du corps, lucioles au bout des doigts délicats refusant l’intrusion illégitime.
Si j'étais lune
de ma traction j'inclinerais la balance
parce que l’amour c’est tout.
Lutin – 06-02-2006