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Un nouveau regard, les mots qui se détachent
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24 avril 2007

Bisounours

amoureux__une_vue_de_haut_sur_banc

Elle est assise sur un banc, le buste penché en avant, elle regarde passer les gens, deux rubans blancs serpentent devant ses yeux, tombés du ciel ils se sont déroulés paisiblement, une langue de lumière est passée devant ses yeux. Elle fixe ses pieds, recherche ses propres empreintes dans la foultitude des pas laissés à l’abandon sur le sable blanc, s’y mêlent aussi des pattes d’oiseaux, drôle de patchwork au pied du banc. Elle aimerait suivre leur histoire, savoir où chaque empreinte s’est orientée, rentrer dans la vie des gens, mais où habitent-ils ? que faisaient-ils là ? et surtout que pensaient-ils quand la langue de lumière est passée devant leurs yeux ?

Elle est assise sur ce banc, les mains posées sur le bois, elle regarde les enfants dans ce parc qui leur est réservé derrière ce grillage vert, jardin dans le jardin. Un monde qui n’est pas pour elle alors qu’elle se sent enfant quand ses yeux tombent sur ses baskets et socquettes blanches. On lui a dit tu es adulte puisque tu as toi-même un enfant. Tu es rentrée dans la cour des grands alors des portes te sont fermées. Ils sont là sous ses yeux, non ils ne lui font pas un pied de nez, les enfants bien éduqués respectent les adultes, non ils ne la regardent pas, comme ils ont raison de ne pas vouloir ouvrir la porte du monde des adultes. Dans leur univers derrière ce grillage vert ils rebondissent, elles les voient voler sous ses yeux, les anges ont toujours des ailes, quelquefois le corps à l’horizontal, ils montent et redescendent au rythme de leurs impulsions, au rythme de leurs envies, une fois sur le dos, puis à plat ventre, sous leurs pieds des élastiques guident leurs acrobaties. C’est un jardin d’acrobates en herbe. Elle aimerait se lever, poser ses pieds sur ce trampoline, se dépouiller de sa peau, au gré de ses pulsions tourner en l’air pour retrouver la liberté du mouvement, la liberté de penser.

Elle est assise sur ce banc, il est là à côté d’elle, il lit, rature quelques mots, trouve des synonymes, enlève des phrases trop longues, sa bouche pointe en avant, mauvais signe, le mouvement de ses lèvres montre son insatisfaction, il aimerait trouver la clef pour une écriture plus fluide, plus incisive. Elle fixe son profil, les traits de son visage lui parlent, elle en connaît tous les reliefs, comme l’enfant reconnaît sa peluche dans le noir, elle sait qu’il est tendu, alors elle pose sa main sur son épaule, alors elle l’embrasse. Elle aimerait avoir la magie de l’enfant, un baiser doux sur la peau qui ôte la douleur, guérit tous les maux, redonne le sourire. Elle a perdu ce pouvoir, et oui elle est adulte, alors elle approche sa bouche, la pose sur la sienne, ses mains encerclent son cou, elle veut faire de ce moment une belle photo ancrée dans leur mémoire. Elle veut qu’il se souvienne. Là enlacés ils laisseront leurs empreintes de baskets mélangées à toutes celles des amoureux qui se sont posés pour regarder les enfants rebondir sur le trampoline en rêvant à leur propre progéniture, là ils laisseront la marque de leurs mains sur le bois quand la moiteur de leur peau s’est faite plus puissante, là ils laisseront la naissance d’un livre quand elle lui faisait la lecture de ses propres textes qui un jour seront couchés sous une couverture de livre. Un jour il sera satisfait, un jour il franchira le pas.

Ils étaient assis sur ce banc, ils se sont levés, un arrêt sur image, clic clac,  le temps d’un baiser pour signer le lieu, dans l’attente d’un livre, l’accomplissement d’un rêve d’enfant.



lutine - 24-04-2007

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Commentaires
L
Ah si les bancs publics pouvaient s'animer, que de contes à l'eau de rose ils nous raconteraient. Merci Neurone.<br /> <br /> Viviane, un livre à quatre mains, très difficile, la surenchère monte lors de l'élaboration, et à sa fin, il est si intime qu'il n'est pas publiable. Le piano permet plus ce type d'exercice.
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N
Je viens de mettre une photo d'amoureux sur banc sur mon blog ... et je découvre la tienne ... sourire.<br /> Très beau texte !
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V
cela sonne comme une ronde<br /> comme la vie<br /> on sent le temps qui passe <br /> donne de l'épaisseur aux souvenirs<br /> remplit<br /> dans la sérénité<br /> et puis il y a l'idée d'un livre à quatre mains<br /> <br /> j'espère que cet enfant<br /> ( présence des AN sous toutes formes<br /> qui évoquent la musique d el'amour)<br /> naîtra bientôt?
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L
Normal le chaussant est confortable et il faut être à l'aise au niveau des pieds pour quitter un peu le sol le temps d'un écrit. Merci de ta visite.
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L
Les rêves les plus fous s'accomplissent lentement.<br /> Pourquoi oublions nous la patience et la longueur du temps?<br /> En tous cas, Lutin, je suis toujours à l'aise...dans tes baskets. ...
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